En colère
Je participe à un forum de discussion, j’ai des échanges passionnants avec quelques unes de mamans participantes. Souvent, certaines mamans m’interpellent, en message privé, pour me demander des conseils en portage. Il ressort de nos échanges que ces mamans ont trop souvent à mon goût, eu à faire à des monitrices de portage qui n’en sont pas ! Arrivées angoissées et maladroites au cours, elles ont rencontré mépris ou désintérêt de la part de l’animatrice du groupe. Les mamans ont assisté à des cours de 3 heures, ou on ne leur pose aucune question, ou on ne montre que les nouages kangourous ventraux, que je considère comme trop technique pour les débutants.
La première chose, quand une femme arrive à un cours, est de lui demander ce qu’elle connaît du portage, ce qu’elle en attend, comment elle pense porter son petit. Une maman qui va devoir reprendre son travail rapidement ne se projettera pas, en tout cas à l’instant ou la question est posée, comme la maman qui a pris son congés parental. Connaître son mode de vie, ses envies, ses questions, permet de lui proposer un cours sur-mesure (et oui, là encore, j’y tiens à ce sur-mesure). Il faut aussi l’observer. Certaines mamans sont minces et tout à fait bien latéralisées, d’autres sont plus enrobées, ont du mal à bouger leur corps, ne sont pas à l’aise avec ce dernier, il faudra en tenir compte lors des explications des nouages. Et ne pas oublier de leur dire que nous aussi, nous avons été débutantes et maladroites …
Dernier exemple en date, une de mes clientes se rend à un cours dans sa ville, en Normandie. La maman est mère d’une petite fille de 9 mois. Elle souhaite apprendre le portage dos. Arrivée en cours, elle se voit assigné dans le groupe des mères déjà exercées, qui viennent en révision. La maman n’a jamais porté sa fille dans le dos, elle mériterait donc qu’on prenne le temps de lui faire explorer avec sa fille le changement d’espace qu’est le portage à dos, de lui expliquer comment trouver son ancrage dans son corps, ses jambes et ses bras, lesquels sont mobilisés pour cet exercice, et pourquoi pas, faire appel aux autres mamans qui souvent, sont ravies de pouvoir aider et parler de leur expérience.
Comprendre comment, mécaniquement, les forces sont réparties permet de visualiser l’exercice et donc de mieux l’appréhender. Là, on l’embarque d’emblé dans le montage de sa puce, (qui n’a jamais été porté à dos, je le répète) ; la monitrice lui fait remarquer qu’elle a vrillé son écharpe, rectifie elle-même, sans rien expliquer. La maman est à la fois frustrée de ne pas avoir compris son erreur et enchantée des sensations éprouvées, la puce ravie.
Refaire le nouage s’avère compliqué, encore une fois, elle est laissée de coté, la monitrice revenant vers elle parce que la puce ne grenouille pas correctement. La maman explique qu’elle a le même soucis avec le hanche à boucle et la dame de lui répondre « bah, là, je ne peux rien pour vous, je ne connais pas ce nouage » et de repartir s’occuper des autres mamans.
Magnifique non ??
Mais quelle idée aussi de venir en cours alors que sa fille a déjà 9 mois ?! Si seulement la monitrice avait posé la question, elle aurait su pourquoi ! …Et qu’en bien même, là n’est pas la question !
Comme je l’explique lors de mes cours, la technique est secondaire, ce qui compte avant tout dans le portage, ce sont l’émotion et les sensations. Combiens de mères, et de pères, tout à coup, découvrent leur tout petit en plongeant dans le regard de leur bébé, lorsqu’ils le portent tout contre eux ? La magie opère. Le bébé rejette légèrement la tête en arrière pour plonger dans le regard du parent porteur et c’est tout un monde qui s’ouvre, de tendresse, d’attention, de dialogue quasi silencieux mais tellement parlant ! On montre des nouages, croisés et kangourous, on laisse les parents tester et choisir ce qui va leur convenir à eux, on les refaits ensemble, avec le poupon puis leur petit. Les parents doivent sortir du cours en sachant faire au moins un nouage, ensuite, ayant pris pleinement plaisir dans le portage de leur bébé, en le voyant s’apaiser, interagir, ils reviennent apprendre d’autres techniques, parce qu’ils se sentent suffisamment confiant pour se l’autoriser.
Parfois, il est préférable de proposer d'autres types de porte-bébé, comme les préformés, parce que les parents s'y sentiront parfaitement à l'aise, et les trouveront plus "simple" à utiliser à contrario de l'écharpe. A chaque fois, c'est une question de sensations.
La dernière mode depuis quelques temps, est de préconiser l’achat d’écharpes courtes, des 3m60, justement pour ne faire que les kangourous. D’une part, c’est priver bons nombres de pères du plaisir du portage, d’autres part, c’est ni plus ni moins que du terrorisme ! C’est une fameuse école qui prône cela, la même qui vilipende les stretch pourtant génialissimes pour les nouveaux-nés (oui, selon elle, on ne peut porter avec une stretch que lorsque l’enfant tient assis ………. Je sais c’est ridicule et risible mais c’est quand même dit …. C’est surtout méconnaître en profondeur les attentes et les besoins des parents !), la même qui répand partout que les Côté Cœur ne sont pas des écharpes de qualité, que l’appliqué ne permet pas de faire des kangourous corrects (là encore, les dames ne sont en rien qualifiées pour tenir de tels propos) alors qu’elles n’ont jamais contacté la principale intéressée à savoir : moi ! … Cette école qui se dit française mais qui cache derrière des intérêts commerciaux avec une marque allemande … Et lorsque je remets en place et en privé une des leurs, elle va se plaindre que je ne suis pas aimable, voir agressive …. C’est à mourir de rire …. Cette école critique d'autres écoles de formation, parce qu'ils n'enseignent pas les kangourous correctement, (?!) forme des monitrices incapables de se remettre en question pour la plupart, incapables d’empathie, qui ne font que répéter ce qu’on leur a dit de dire, sans plus chercher en avant. Ces monitrices qui terrorisent bon nombre de mamans, lesquelles ressortent du cours sans avoir pris de plaisir, en pensant être trop nulle pour porter leur bébé, en laissant tomber tout simplement le portage, en désespoir de cause.
Et ça, ça me met en colère !! Parce que ce n’est pas ainsi que je vois la transmission d’un portage de qualité. Ce n’est pas en prenant le pouvoir sur l’autre, mais en étant dans son écoute, en faisant abstraction de ce qu’on est, de ce en quoi on croit. Il y a beaucoup de travail à faire avant d’en arriver là, je pense …